LE JOURNAL DU DROIT DES JEUNES

L'éditorial de Florence Bourton et Benoit Van Keirsbilck dans le JDJ N°385

Attention danger !

À l’échelle de la planète, la peste brune se répand, ultranationaliste, populiste et xénophobe : Hongrie, Italie, Etats-Unis, Brésil, Turquie, Autriche, etc.

Le 26 mai 2019, la Belgique n’a malheureusement pas fait exception. Le Vlaams Belang (VB) devient le deuxième parti de Flandre, ayant récolté un tiers de ses voix auprès des jeunes (1). Le parti, jusqu’à présent exclu des coalitions par un cordon sanitaire (mais pour combien de temps encore ?), n’a pas lésiné sur les moyens et a dépensé des centaines de milliers d’euros sur Facebook pour toucher directement la jeune génération.

Au lendemain des élections, la presse cherche à comprendre. Le VB a procédé à un ravalement de façade, rajeuni ses cadres, légèrement policé son langage pour se donner une apparence plus «fréquentable». La VRT, partie à la rencontre de leurs électeurs.trices, rapporte que leur choix est surtout motivé par un ras-le-bol général vis-à-vis des partis dits traditionnels (2). Et sur ce point, le VB a réussi à se présenter comme un «parti antisystème». Mais ne nous y trompons pas, tout cela n’est que superficiel. En quelques tweets, le vrai visage de ce parti réapparaît : les jeunes (jamais suffisamment belges) peuvent aller se noyer dans la méditerranée. Le fond de l’idéologie reste la haine de l’autre, la discrimination, l’exclusion, la misogynie, l’entre soi, bref la bêtise et la méchanceté.

Le Belang a séduit avec le pan «migration» de son programme en jouant comme à son habitude la carte de la peur, mais aborde aussi la justice, le chômage, la sécurité sociale et les pensions. En plus du racisme flagrant de ses idées, ses propositions en matière de droits fondamentaux tels que le droit à l’avortement, l’euthanasie, la peine de mort sont glaçantes. Que dire encore de sa vision de la place de la femme, des minorités, de la différence ?

Ils ont déjà une influence considérable sur les autres partis qui soit restent trop timorés face à cette menace, soit courent derrière leurs idées en les légitimant, soit encore n’excluent pas de les associer au pouvoir. On attend tout autre chose de leur part !

Manifestement, tous les efforts d’éducation et de mémoire sont insuffisants face à la démagogie, la haine et le repli sur soi identitaire. Il faut pourtant inlassablement poursuivre ce travail, le seul payant à long terme. Et on ne peut pas capituler, on sait ce qui nous attend si on les laisse accéder au pouvoir.

Les motifs de réjouissance existent cependant; un exemple parmi d’autres, les réactions de soutien à Carola Rackete, la courageuse capitaine du Sea Watch 3, se sont multipliées et la justice a rappelé des principes fondamentaux : son action relevait de «l’accomplissement d’un devoir», celui de sauver des vies humaines, qui justifie sa désobéissance aux ordres des autorités italiennes. Alors, continuons à rappeler les principes fondamentaux du vivre ensemble, de la démocratie, des droits humains, mais répondons aussi aux craintes et difficultés de la population. Le terreau de la haine étant la précarité et l’exclusion sociale.

Florence Bourton et Benoit Van Keirsbilck


(1) https://www.nieuwsblad.be/cnt/dmf20190530_04437226 30 mai 2019 : 30 % des électeurs du VB a moins de 34 ans ; les trois quart ont un bas niveau de formation ;
(2) https://www.vrt.be/vrtnws/nl/2019/05/27/vlaams-belang-stemmers-getuigenissen/ 27 mai 2019