LE JOURNAL DU DROIT DES JEUNES

L'éditorial de Benoît Van Keirsbilck dans le JDJ N°307

Une plaie inutile, coûteuse et démotivante

Les déclarations de deux ministres de la Communauté française affirmant vouloir diminuer le redoublement dans l’enseignement obligatoire sont encourageantes. Cela fait longtemps qu’on attendait de telles prises de position.

Il s’agit maintenant de les appliquer, et nous attendrons avec impatience et curiosité les premières mesures concrètes.

Disons-le clairement : le redoublement est une plaie et son ampleur une honte pour notre enseignement. Il est le plus souvent inutile, certainement coûteux (pour la famille, mais aussi pour l’ensemble de la société), démotivant et a des conséquences sociales non négligeables : un élève qui redouble perd confiance en lui-même, risque plus qu’un autre de décrocher et de se retrouver in fine sans diplôme dans les statistiques du chômage.

L’introduction d’une possibilité de recours contre les décisions des conseils de classe aura été une bonne chose, mais n’aura certainement pas évité tous les redoublements injustifiés. Nombre d’écoles ne jouent pas le jeu correctement, notamment en informant mal les parents et élèves et en décourageant, parfois par des menaces voilées, ceux qui auraient l’intention de l’introduire. Les parents hésitent aussi, de crainte de représailles, si leur enfant reste dans la même école et garde le professeur dont la cote a été contestée (ou si un petit frère ou petite soeur doit encore passer par là).

La longueur des recours n’est pas non plus sans poser problème : la décision contre les décisions des conseils de classe de septembre tombe au mieux à la mi-octobre. Pendant ce temps, l’enfant redouble son année et perd de la matière s’il s’avère qu’il peut passer de classe.

Il est donc urgent d’améliorer ce dispositif.

Mais ça ne suffira pas. Il faut aussi un monitoring des taux de redoublement (parfois très disparates) par école et même par professeur. Il est inadmissible, comme ça se passe trop fréquemment, qu’un seul enseignant soit la cause du redoublement d’une majorité d’élèves de sa classe (certains s’en font encore une gloriole). En pareille hypothèse, ce ne sont pas les élèves qui sont les cancres, c’est le professeur qui aura prouvé son incapacité à dispenser sa matière de manière compréhensible en s’assurant que tous les élèves comprennent et suivent. Cet enseignant devrait être renvoyé en formation et bénéficier de leçons de pédagogie.

Il convient aussi de rappeler que les décisions des conseils de classe sont collégiales ; un seul professeur ne peut dicter sa loi à tous les autres en décidant seul. Et, quoi qu’en pensent certains Pouvoirs organisateurs qui font preuve d’une grande imagination au niveau des critères de réussite, ceux-ci sont déterminés, dans l’enseignement secondaire, par un arrêté royal de 1984. Les écoles disposent d’une certaine marge de manoeuvre, mais ne peuvent certainement pas y déroger.

N’oublions pas qu’un élève qui redouble pour un ou deux échecs va suivre des cours qui, pour 8/10èmes, sont censés être connus.

Nous attendons donc des mesures aussi fortes que les déclarations des Ministres.