LE JOURNAL DU DROIT DES JEUNES

L'éditorial de Benoît Van Keirbilck dans le JDJ N°320

Nos indignes prisons

Le Comité de prévention de la torture et des traitements inhumains et dégradants du Conseil de l’Europe (CPT) vient de rendre public son dernier rapport sur la situation du système pénitentiaire belge. Il fait suite à une visite des prisons de Forest et d’Andenne en avril 2012 (1).

A côté du problème endémique de surpopulation et des conditions indignes de détention (certaines cellules ne disposent pas d’eau courante ou de sanitaires, des détenus doivent dormir sur des matelas posés à même le sol,…), le Comité a regretté l’absence quasi-totale d’activités mises à leur disposition, les délais pour obtenir une «visite à table(2)» et le faible ratio personnel/détenus.

Il s’est également penché sur la situation lors des mouvements de grève du personnel pénitentiaire. Il a relevé les nombreuses restrictions imposées aux détenus, l’insuffisance en personnel, l’impossibilité pour les services d’aide aux détenus et les services psycho-sociaux de remplir leur mission. Pour le CPT, le recours systématique aux services de police ou à la Protection civile ne peut constituer une solution pérenne pour remédier aux dysfonctionnements majeurs engendrés par ces grèves. Il réitère ainsi sa recommandation (controversée, faut-il le préciser ?) : instaurer un «service garanti» au sein des établissements pénitentiaires.

Pour ce qui est de la surpopulation carcérale, qui implique des conditions de détention indignes et engendre des coûts humains et budgétaires non négligeables (3), sa conclusion est sans appel : «aucune des mesures mises en oeuvre à ce jour, à l’exception des libérations anticipées, n’a eu pour effet une baisse structurelle et durable de la surpopulation carcérale».

L’augmentation du nombre de places d’emprisonnement ne peut constituer la seule réponse au problème.

N’oublions pas que le traitement réservé aux détenus a des conséquences importantes sur leur entourage, notamment leur droit de visite (souvent très difficile à faire respecter), les conditions dans laquelle cette dernière se déroule, et l’image que le détenu montre à sa famille et ses enfants. L’absence d’activités proposées ne leur permet pas non plus de préparer adéquatement leur sortie et donc de jouer un rôle positif auprès de leurs proches.

Le CPT formule de nombreuses recommandations telles la ratification du Protocole optionnel à la Convention contre la torture (OPCAT), l’amélioration de l’accès à un avocat dès l’arrestation,… Il annonce une visite périodique en 2013, à l’occasion de laquelle il ira certainement visiter les lieux où les mineurs sont privés de liberté (et il y en a beaucoup).

Le CPT dispose d’un potentiel considérable pour promouvoir les droits des enfants privés de liberté (4). Encore faut-il connaître son existence et l’utiliser à bon escient.