LE JOURNAL DU DROIT DES JEUNES

L'éditorial de Benoît Van Keirbilck dans le JDJ N°321

Les MENA sont d’abord des enfants comme les autres

«MENA» (mineurs étrangers non accompagnés) : c'est ainsi qu'on désigne ces enfants qui arrivent en Belgique sans leurs parents, en provenance de l'étranger, espérant des cieux meilleurs que ceux qu'ils ont été amenés à fuir (de gré ou parfois de force). En les rangeant dans une catégorie administrative, cet acronyme finit par occulter leur réalité humaine : celle d'enfants traités différemment des autres, qui n'ont pas les mêmes droits, alors qu'ils devraient être protégés et bénéficier d'une prise en charge adéquate de nos autorités et administrations.

Bien souvent, ils ne sont d'ailleurs pas considérés comme des enfants, mais comme des migrants, profiteurs potentiels, menteurs probables (sur leur âge, sur leur parcours et leur situation...), ce qui justifie toutes les discriminations.

Comment expliquer autrement ce dispositif d'accueil d'urgence créé par la ministre Huytebroeck, qui n'est activé que quand les températures descendent en dessous de 0°(1) ? Il est vrai que par temps doux, le risque est moins grand de trouver un de ces jeunes migrants mort de froid dans la rue. Là, ça peut faire tache et même coûter une réélection.

Comment comprendre aussi que c'est une administration chargée de la politique de migration, l'Office des étrangers, qui ait la charge de déterminer l'intérêt de ces enfants (2) ? On nage dans le surréalisme.

Maggie De Block, la secrétaire d’État à l’Asile et la Migration, à l’Intégration sociale et à la Lutte contre la pauvreté, adjointe à la ministre de la Justice, se félicitait récemment d'avoir jugulé la pression migratoire. Si ce résultat était la conséquence d'une amélioration des conditions de vie en Syrie, au Congo, au Mali, ou d'une diminution des discriminations à l'égard des minorités, notamment Rom, en Roumanie, au Kosovo ou en Tchétchénie, on se réjouirait avec elle. Malheureusement, chacun sait qu'il n'en est rien, que cette diminution est simplement le résultat d'une politique beaucoup plus dure en matière de migration, accueil, intégration, asile, pas d'une amélioration des droits de l'Homme (ici comme ailleurs).

Les articles [que propose le JDJ dans son numéro 321] ont donc le mérite de rappeler ces discriminations, et surtout de remettre de l'humain dans une matière où on parle surtout de flux migratoires, de taux d’occupation de centres d’accueil, de trajet retour, de coaches pour convaincre qu’il vaut mieux partir,…


(1) Dispositif activé à partir du 12 janvier 2013.
(2) Notons à cet égard la position du HCR concernant cette question : cette agence onusienne rappelle l'indispensable indépendance de l'instance qui se prononce sur l'intérêt supérieur de l'enfant, par rapport aux autorités d'immigration de l'Etat.
Voir : La détermination de l'intérêt supérieur de l'enfant Questions à Andrea Vonkeman, Senior Policy Offi cer, Policy and Legal Support Unit, Bureau pour l'Europe, Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), ce numéro, p. 37.