LE JOURNAL DU DROIT DES JEUNES

L'éditorial de Benoît Van Keirsbilck dans le JDJ N°341

Des «Charlie» dans le monde entier

Le Journal du droit des jeunes ne peut pas ne pas s’associer aux nombreux hommages et manifestations qui ont eu lieu à la suite de l’assassinat barbare de journalistes et caricaturistes de Charlie Hebdo. La presse, qui paye déjà quotidiennement un lourd tribut au combat pour la liberté et les droits fondamentaux, a été touchée dans sa chair, d’une manière inqualifiable.

Nous n’allons pas ici refaire les débats de ces dernières semaines sur l’importance vitale pour notre démocratie de garantir cette liberté tellement essentielle.

Par contre, puisqu’un des thèmes de ce numéro (prévu de longue date et donc pas en réaction aux événements récents) touche précisément à ces jeunes qui se radicalisent, il nous faut revenir sur le rôle et la responsabilité de la société en cette matière.

Si on ne peut d’aucune manière minimiser la responsabilité individuelle des auteurs de ces massacres et de tous ceux qui les ont aidés, qui ont permis que ça arrive, qui ont favorisé l’émergence de ces délires criminels, la société se doit d’analyser les causes de ces dérives et surtout ce qui peut être fait pour en prévenir l’émergence.

Certes, l’action policière est indispensable et on n’imagine pas une seule seconde que les autorités n’y accordent pas une attention prioritaire d’autant plus soutenue que les signes de dérive terroriste se multiplient et touchent nos sociétés là où ça fait le plus mal.

Mais la seule réaction policière sera toujours insuffisante et ne pourra jamais venir à bout de tous ceux qui voient dans l’action violente, les attentats, les prises d’otage, un moyen d’exprimer leur désamour vis-à-vis de la société dans laquelle ils ont grandi (le plus souvent) et dans laquelle ils ne se reconnaissent pas.

Le travail d’analyse doit être affiné sur les causes de ces dérives et les moyens préventifs qui peuvent tenter d’y répondre. On se doit de chercher à comprendre ce qui nous apparaît comme incompréhensible. Que des jeunes (ou moins jeunes) soient persuadés que leur religion leur impose de se battre, armes à la main, dans une guerre qui n’est pas la leur ou de commettre des faits de violence extrême, est terriblement inquiétant; même si un tout petit nombre finira par passer à l’acte, la situation est suffisamment préoccupante pour ne pas y accorder une priorité au moins aussi importante que la réponse policière.

Et parmi les mesures répressives envisagées, il faut dire et répéter que plusieurs d’entre elles n’auront au mieux aucun effet, au pire, un effet inverse à celui qui est escompté, puisqu’elles restreindront nos libertés sans apporter la moindre solution.

Donnons-nous les moyens de dépasser l’émotion légitime et de panser nos plaies pour réfléchir à l’ensemble de solutions qui peuvent être tentées en privilégiant l’éducation, sans écarter d’emblée certaines pistes parce qu’elles ne paraîtraient pas assez dures.

Une dernière chose et non des moindres : s’il faut être Charlie, il faut l’être partout ! L’obscurantisme entraîne des milliers de Charlie Hebdo partout dans le monde quotidiennement. En ce moment, nos pensées vont particulièrement aux victimes de Boko Haram dans le nord du Nigéria. Là aussi, la répression seule n’en arrivera pas à bout.