"Ici et ailleurs" du JDJ N°391

Discrimination à l’inscription

Décision intéressante, qui pourrait créer un précédent : la Cour d’appel de Versailles (FR), après une très longue procédure, a condamné la Mairie de Sucy-en-Brie à payer des dommages et intérêts à une famille rom à la suite du refus qui leur avait été opposé d’inscrire les enfants à l’école, sous prétexte d’absence de domiciliation.

La Cour rappelle la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme qui considère qu’une attention toute particulière doit être apportée au droit à l’instruction des gens du voyage et l’aspect fondamental du droit à l’éducation.

L’irrégularité de leur séjour dans la commune n’affecte en rien le droit à l’instruction de ces enfants. (Cour Appel Versailles, 19/06/2019, Merci à Laurent Fastrez).

Le tuteur MENA fiché

L’AR du 3 juillet 2019 (MB 14.02.2020, vig. 24/02/2020) prévoit que les coordonnées du tuteur ou du tuteur provisoire du mineur étranger non accompagné (au sens de la loi sur la tutelle), devra figurer dans le registre national pour permettre aux autorités habilitées à les consulter de le contacter.

Cette information sera encodée par le Service des tutelles.

Le défenseur des ONG…

Le Conseil d’experts sur le droit en matière d’organisations non gouvernementales (ONG) (oui, oui, ça existe !), créé en 2008 par la Conférence des OING du Conseil de l’Europe (COE), analyse les législations nationales des 47 États membres et du Belarus, relatives aux ONG au regard des normes internationales, dont la CEDH (dont l’art. 11 garantit la liberté d’association). Il vise à créer un environnement favorable aux ONG dans toute l’Europe et reflète l’engagement du COE en faveur du rôle de la société civile dans la défense de la démocratie, des droits de l’Homme et de l’État de droit.

(Infos : NGO-Unit@coe.int ; avis et études: www.coe.int/ong).

… pointe la criminalisation…

Il a déjà publié plusieurs rapports sur les conditions pour l’établissement des ONG, la gouvernance interne des ONG, les sanctions et responsabilités concernant les ONG ou encore l’examen de l’évolution des normes, des mécanismes et de la jurisprudence.

Son dernier rapport porte sur l’utilisation du droit pénal pour restreindre le travail des ONG soutenant les réfugiés et autres migrants dans les États membres du Conseil de l’Europe – 2019 (en anglais).

… des associations solidaires.

Sans étonnement, il estime que les lois qui criminalisent l’activité des ONG impactent significativement leur travail, la liberté d’association et d’autres droits humains. Les lois sont généralement très intrusives, vagues et créent une insécurité juridique.

Elles entraînent des réactions disproportionnées alors que ces ONG démontrent de la solidarité, comblent bien souvent les manquements des autorités en matière humanitaire et de protection et agissent concrètement contre la xénophobie qui prévaut dans nombre d’États du COE. Ce Conseil d’experts s’avère donc crucial en ces temps d’érosion des droits fondamentaux et d’attaques contre la société civile.

Les maisons de transition…

Les maisons de transition sont des lieux pénitentiaires de petite taille, qui permettent d’aménager la fin de la détention de certains détenus, à des conditions bien strictes en vue de diminuer la récidive. Une première a ouvert à Malines le 9 septembre 2019 et une deuxième à Enghien le 14 janvier 2020.

Si l’idée semble intéressante au premier abord, la Ligue des droits Humains (LDH) et l’Organisation international des prisons (OIP) émettent des critiques sérieuses à leur égard : critères beaucoup trop stricts pour en bénéficier, absence de réflexion en amont pour éviter les effets néfastes de la prison sur la population détenue et globalement le «vide sidéral de la politique carcérale» qui continue à construire des prisons

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… lieux de diminution de la récidive…

Au contraire des objectifs annoncés, la LDH et l’OIP dénoncent le risque de renforcement du contrôle social du groupe ciblé, de création d’un lieu de nondroit confié à des acteurs privés en dehors de tout contrôle et sans transparence.

C’est en effet à la branche soins (sic !) de la fameuse société G4S que l’exploitation de ces maisons a été confiée, plutôt qu’à des associations reconnues dans le secteur pénitencier.

Des études font d’ailleurs état d’un taux de récidive plus important après un passage en prison privée.

… ou privatisation de la prison ?…

Il existe en outre un flou par rapport aux règles applicables pour protéger les droits des personnes détenues au sein de ces maisons, quels recours, quel organe de contrôle indépendant pour assurer la surveillance de ces maisons, le ministre ayant déclaré que la loi pénitentiaire n’y serait pas d’application !

… les doutes de la LDH et l’OIP

L’engouement belge et européen pour la création de ce nouveau type de détention qui ne fait que légitimer l’institution carcérale inquiète ces acteurs qui condamnent le recours toujours plus important au secteur privé pour gérer des pans entiers du système pénal, déresponsabilisant ainsi l’État de ses fonctions régaliennes et encourageant par cette industrialisation une expansion du système carcéral. (Le Vif, 13/02/2020)

Des jeunes extraordinaires. Focus sur l’Aide à la Jeunesse.

«En toute sincérité, nous ne savons pas ce qu’est un jeune ordinaire. Et sans doute que, si nous pensions le savoir, cela nécessiterait de réfléchir longuement à ce que cela dit de nous. En revanche, quand les travailleurs de Samarcande ont utilisé l’adjectif «extraordinaire» en insistant bien sur la césure qu’ils placent dans le mot, leur propos a tout de suite résonné à nos oreilles. Ces jeunes qui ne vont pas à l’école. Ou qui ne vivent pas avec leurs parents. Qui avancent sur un chemin cabossé. Ceux qu’on punit presque comme des adultes. Ces jeunes qui sortent de l’ordinaire. Dans ce numéro consacré à l’Aide à la Jeunesse, et aux questions qui gravitent autour, donner la parole à ces jeunes singuliers sera le fil rouge, de l’appel de Bernard De Vos pour les droits à l’expression des jeunes à la recherche de réponses adéquates pour ceux en situation de grande précarité, que nous présente Fanny…»

Voilà une présentation attrayante du dernier numéro de Prospective Jeunesse, téléchargeable gratuitement (https://prospective-jeunesse.be/la-revue/).


Les bésicles de Jiji

Le Prix 2020 des Bésicles opaques

Trop facile : il va de lui-même au titre d’une dépêche Belga que Le Soir (21 novembre) reproduit avec zèle. « La STIB montre patte blanche pour le partage de ses images ». Pourquoi, elles ont l’air bidon ? Le texte explique que les zones de police bruxelloises trouvent que la société de transports en commun se fait prier pour leur rendre accessible le produit de sa vidéosurveillance, alors qu’elle-même dit « mettre tout en œuvre » pour y arriver. Mais l’expression du titre vient d’une fable de La Fontaine, « Le loup, la chèvre et le chevreau » et signifie « donner le mot de passe ».

Jeteurs de sorts

Après divers espoirs déçus, D. Reynders (MR) est parvenu à obtenir son atterrissage à la Commission européenne. En attendant, au gouvernement fédéral de touche-à-tout qui vivote depuis les élections, il était aussi chargé de la Défense. Cet élément éclaire un propos du Soir (5 novembre) au sujet des relations difficiles entre contrôleurs aériens civils et martiaux : « Le personnel de Skeyes [ex-Belgocontrol] voit déjà l’arrivé des militaires d’un mauvais œil ». Cela semble dangereux.

Tout à fait piqués

En vacances en Turquie, un touriste acquiert un chiot originaire d’Ukraine et le ramène en Belgique. Parce que l’animal n’est pas vacciné contre la rage, l’AFSCA ordonne aussitôt au propriétaire de le faire euthanasier. Par son arrêt n° 245.796 du 17 octobre 2019, le Conseil d’État suspend cette décision en extrême urgence, notamment pour violation du principe d’audition préalable. L’arrêt parle d’une « diepgaande maatregel », une mesure approfondie : très longue aiguille ? Il souligne aussi que le requérant n’a pas été informé à l’avance « van welke maatregel tegen hem werd overwogen », quant à la mesure qui était envisagée contre lui. Euthanasier le maître ? Dur, dur.

Ça tombe dru

  • Le Soir (4 novembre) a consulté le site internet de la Ville de Bruxelles : « Les véhicules détectés (…) parce qu’ils n’avaient pas réglé leur titre de parking (…), placé leur disque de stationnement (…) ou parce qu’ils ne détenaient pas de carte de riverain (…) ». Voitures intelligentes, mais radines.

  • Ibidem (15 novembre), sur la nouvelle Commission européenne : « Le Français Th. Breton (…), ex-patron du géant mondial du numérique Atos (…) [est] promis à un portefeuille de commissaire XXL ». Cela explique ceci, mais il n’a pourtant pas l’air si grand.

  • Quant à Ch. Michel (30 novembre, à la « une ») : « Je voudrais être les deux pieds dans la réalité européenne ». Comme chacun/e d’entre nous. Et avant, il faisait le poirier ?

  • Aussi (19 novembre), une dépêche Belga (encore !) : « Bruxelles : le tribunal de police croule à nouveau sous les procédures en appel ». Mais non : c’est la sévérité de deux de ses juges en matière de roulage qui provoque un flot de recours au tribunal de 1ère instance.

  • De plus (20 novembre), Belga toujours annonce des mesures de solidarité pour rendre des toilettes accessibles aux femmes du parc Maximilien, hélas en qualifiant ce service de « fondamental ».

  • Itou (22 novembre), le retour du silure, poisson-chat géant : selon le directeur de la Maison de la pêche de Wallonie, il est reparu « en s’étant échappé d’une pisciculture en région liégeoise et en remontant le Danube ». Pour aboutir dans la Sambre : GPS en panne ?

  • En outre (29 novembre), la mobilisation citoyenne d’opposition à la Lega del Nord de M. Salvini s’appelle en italien « le sardine ». Et elle « a fait tache d’huile ». Come no ?

  • Et encore 30 novembre), un gros titre : « Les marchés de Noël en quête de durabilité ». Cela n’ira pas sans mal, comme le chantait Bourvil : « Y a d’la morte saison dans la vente des cocardes du quatorze juillet ».

  • Enfin (2 décembre), le calendrier de l’Avent du studio culinaire Bouchée double «se vend comme des petits pains ». Au chocolat. 

  • Sur le site du ministère français de la Culture, une notice pas récente consacrée à la cité La Castellane (Marseille) : « La jeunesse est dehors, nombreuse qui commerce, échange et part livrer à la ville sa stupéfiante énergie ». L’endroit est devenu un hypermarché des drogues.

  • Un message publicitaire sur la RTBF Radio : « Les athlètes belges sont prêts pour Tokyo. Supportez-les sur teambelgium.be. » Et quelle est l’adresse pour ceux qui ne supportent pas les émissions sportives ?

  • Le mot d’ordre d’Amnesty International pour le 25 novembre : « Faites des violences faites aux femmes votre priorité ». On espère que ce n’est pas ce qu’ils ont voulu dire.