LE JOURNAL DU DROIT DES JEUNES

L'éditorial de Benoît Van Keirsbilck dans le JDJ N°293

Qu'on les envoie aux galères !

Alors que la réforme de 2006 de la loi du 8 avril 1965 relative à la protection de la jeunesse avait prévu la création de nombreuses places fermées et qu’un protocole avait été signé sous la précédente législature (qui prévoit, du côté francophone, 50 places à St. Hubert et 120 places à Achènes), la Ministre Evelyne Huytebroeck, avait laissé entendre qu’elle voulait évaluer la situation existante avant de confirmer la nécessité d’augmenter encore les places.

«Il faut d’abord réfléchir au nombre de places existantes, aux priorités de placement et aux possibilités financières», a-t-elle répondu au député Willy Borsus en Commission du parlement de la Communauté française. La création des 170 places représente un accroissement de plus de 120% de la capacité existante, souligne la Ministre.

Mal lui en prit ! Elle aura été la cible d’attaques de toutes parts.

En particulier du MR (quoi d’étonnant ?, ils sont dans l’opposition à la Communauté et la sécurité à toujours été du pain bénit pour eux); Willy Borsus en particulier, arrogant, met la Ministre «en demeure» de statuer rapidement sur cette ouverture de places faute de quoi elle devrait démissionner !

Pourtant, la réaction de la Ministre était on ne peut plus logique et surtout responsable : on est à la veille d’une nouvelle augmentation des places fermées (on passe de 26 à Everberg à 50 à Saint-Hubert). Il convient d’abord d’évaluer les besoins de places supplémentaires et la meilleure manière d’utiliser son budget (Achêne coûtera 11,4 millions d’euros - soit 284 agents en frais annuels, uniquement pour la Communauté française).

Il est entendu qu’on peut créer des places fermées sans fin (nombre de mandataires bruxellois réclament d’ailleurs, outre l’abaissement de la majorité à 16 ans et la prise en charge des jeunes délinquants par l’armée, la création d’un centre fermé de 100 places à Bruxelles !) et qu’elles seront immédiatement occupées (ce qui fera dire qu’elles étaient bien nécessaires !).

Le Gouvernement de la Communauté française a finalement marqué son accord le 18 mars 2010, sur l’exécution de ce protocole d’accord, mais aussi (bon sang, mais c’est bien sûr !) d’évaluer l’impact de ce protocole.

Et pour permettre à Evelyne Huytebroeck d’avaler la pilule, le Gouvernement décide de développer davantage les dispositifs qui favorisent l’intégration et la socialisation du jeune dans son milieu de vie et de travailler avec le jeune et sa famille dès les premiers signes de comportements délinquants, sans attendre qu’il ne soit déjà ancré dans une logique délinquante, et ainsi diminuer le recours au placement en IPPJ. Pour ce dernier objectif, qui vivra verra.

Une série d’autres mesures sont également envisagées (dont l’amélioration des conditions de scolarité en IPPJ, la réintégration post-IPPJ, la diversification des mesures éducatives, le renforcement de la médiation (en collaboration avec les services d’aide aux victimes) et des prestations d’intérêt général et, last but not least, de concrétiser la possibilité d’un accompagnement éducatif intensif et d’un encadrement individualisé.

On s’arrête là. Jusqu’au prochain fait divers surmédiatisé qui permettra à d’autres Rambos d’aller encore un pas plus loin : le retour aux galères.