En Belgique, laisser des personnes à la rue pendant des jours et des jours, sous prétexte de la saturation des centres d’accueil, est un phénomène récurrent qui n’émeut pas grand monde, en tout cas du côté des décideurs.
À côté de l’amateurisme et du fatalisme de façade des Secrétaires d’État à l’accueil successifs, on constate le silence assourdissant des autres responsables politiques, en premier lieu du Premier Ministre.
L’extraordinaire capacité de mobilisation du public et des associations, qui pallient depuis des années les carences des autorités (1), permet à ces dernières de ne pas s’en préoccuper outre mesure, voire même d’entraver l’action de ces plateformes citoyennes accusées quand ça arrange le politique d’aider des personnes en séjour irrégulier.
Le triste spectacle des campements improvisés devant le Petit-Château depuis près d’un an, en est une sempiternelle illustration. Le changement de lieu pour l’enregistrement des demandes d’asile et d’accueil (du Parc Maximilien au Petit-Château et maintenant au Bd. Pachéco) n’apporte qu’un surplus de difficultés pour les intéressés, mais strictement aucune solution.
Y a-t-il volonté délibérée d’organiser ce désordre qui pousse les candidats à l’accueil à aller voir ailleurs, eux qui espéraient pouvoir panser leurs blessures accumulées par des mois d’exil et de violence à tous les coins de rue ?
Ou s’agit-il de l’illustration d’une incompétence crasse ?
Pour notre part, nous n’hésitons pas : c’est l’un et l’autre, avec le mépris en plus !
La mise en place en urgence d’un lieu d’enregistrement et de filières d’accueil pour les réfugiés ukrainiens est bien la preuve que quand on veut, on peut. Mais c’est une illustration parmi d’autres du double standard, s’agissant de l’accueil des personnes qui fuient leur pays, discrimination pleinement assumée, entre autres, par le précédent Secrétaire d’État.
Dans les pages qui suivent, on lira des analyses sur le système d’accueil des enfants non accompagnés, avec toutes ses failles et manquements, ainsi que l’évaluation d’une initiative d’accueil à très bas seuil (pratiquement inconditionnel) pour les enfants en transit, menée en tant que projet pilote pendant des mois par MSF (dont la reprise par les pouvoirs publics, bien qu’annoncée, n’aura pas lieu avant des années, du fait de la réorganisation de tout le quartier situé autour de la Gare du Midi).
Mais on lira aussi dans ce numéro 417 du JDJ [en Tribune] l’appel lancé au Premier Ministre par la société civile qui une fois de plus fait le job de l’État : proposer des solutions pratiques, réalistes pour le très court, moyen et long terme.
Une réponse claire et précise à la nouvelle Secrétaire d’État, Nicole De Moor, qui à peine en place, avait déjà bien rôdé son discours fataliste : «on fait ce qu’on peut !»
Eh bien chère Madame, si vous ne pouvez pas plus, dépêchez-vous de céder la place à quelqu’un de plus compétent.
Benoit Van Keirsbilck
(1) Non sans grandes difficultés comme l’atteste la décision annoncée ce 21/09/2022 par le Hub Humanitaire de fermer partiellement, faute de moyens.