"Ici et ailleurs" du JDJ N°401

Et la palme de la novlangue va à …

… l’éducation nationale française qui commente une décision d’exclusion d’un élève handicapé de 6 ans d’une école primaire : l’élève n’a pas fait l’objet d’une radiation, «mais d’une suspension temporaire de la scolarisation, avec maintien à distance du lien pédagogique ».

Après la distanciation sociale pour cause de covid, nous avons maintenant la distanciation du lien pédagogique faute de moyens adéquats octroyés à l’école pour répondre aux besoins spécifiques de cet enfant.

À quand la distanciation professionnelle quand des incompétents gèrent un département aussi important que l’éducation ?

Vous avez dit citoyenneté ?

AtMOsphères (une AMO bruxelloise) s’est lancé dans un projet aussi ambitieux qu’important : amener un groupe de jeunes bruxellois à la rencontre du peuple rwandais afin de pouvoir notamment échanger avec eux sur les questions en lien avec le génocide et sur la manière dont les personnes sont parvenues «à le dépasser» et à aujourd’hui revivre ensemble.

Un projet qui permet aussi de faire le lien avec la réalité belge; l’idée est de pouvoir permettre aux jeunes de réfléchir sur la notion de citoyenneté et sur l’importance d’y avoir accès et d’ainsi lutter contre toute forme de repli identitaire ou autres.

www.atmospheres-amo.be

Distanciation sociale et …

Des chercheurs en criminologie ont étudié les impacts de la distanciation sociale sur le travail des policiers, en milieu carcéral ou sur la violence domestique.

Premier constat : en éloignant physiquement les individus, les règles sanitaires les éloignent également socialement.

La perception de la dangerosité de l’autre s’est amplifiée, il est devenu socialement hostile. D’autre part, le confinement et la mise à l’arrêt de nombreux secteurs d’activité ont provoqué une insécurité financière.

… violences domestiques.

Le confinement a créé, au sein des couples, une proximité forcée et permanente qui a éloigné la victime de ses ressources sociales et provoqué une augmentation des demandes d’hébergement d’urgence.

… ou les prisons

Tout aussi peu étonnant, le confinement a augmenté la promiscuité entre détenus, déjà intenable en temps normal, et enlevé certains droits aux détenus, dont celui de garder une proximité relationnelle avec son entourage.

L’espace carcéral est devenu encore plus exigu et a augmenté les tensions entre détenus et agents pénitentiaires.

L’article fait partie du dernier numéro d’e-legal, Revue de droit et de criminologie de l’ULB (le dernier numéro, consacré à la Covid-19, aborde des thématiques juridiques et criminologiques directement en lien avec la crise sanitaire). Contact : com.recherche@ulb.ac.be

Droit à la nationalité…

Le Comité des droits de l’Homme des Nations unies a prononcé une décision particulièrement importante qui considère que les Pays- Bas ont violé les droits de l’enfant en enregistrant un enfant comme étant «d’identité inconnue», sans lui apporter non plus la protection du statut d’apatride.

Il s’agit de la première décision sur le droit d’un enfant né aux Pays-Bas en 2010 d’une mère chinoise à avoir une identité.

La maman avait été victime de trafic quand elle avait 15 ans, mais elle n’avait pas pu bénéficier de la protection pourtant prévue par la loi qui aurait débouché sur un statut de séjour permanent. Du fait de cette situation, l’enfant n’a pas pu bénéficier de la nationalité chinoise et la mère et l’enfant restent dans un centre d’accueil sous menace permanente d’expulsion.

… pour les enfants…

Le Comité rappelle que les États ont la responsabilité de garantir que les enfants apatrides qui sont sous leur responsabilité qui n’ont pas de possibilité d’acquérir une autre nationalité, bénéficient d’une protection de l’État.

Rien qu’aux Pays-Bas, il y aurait plus de 13.000 enfants enregistrés avec une «nationalité inconnue», la plupart nés dans le pays.

… apatrides

Le Comité demande aux Pays-Bas de revoir sa décision en reconnaissant un statut d’apatride qui pourrait ouvrir un droit à la nationalité.

Au-delà, il demande une révision générale de la législation pour éviter ce type de situations à l’avenir. Décision du 28/12/2020 ; réf. : CCPR/ C/130/D/2918/2016; accessible sur : la « UN Treaty Body Database ». Nous reviendrons sur cette importante décision et en particulier ses effets en droit belge.

Le retour des USA pour …

Avec l’arrivée de l’Administration Biden, des changements importants sont déjà en train de voir le jour. Pointons notamment le retour des USA dans l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) en ce compris le rétablissement des contributions financières, l’abrogation des législations anti-avortement, la protection de la santé de la femme au niveau national et international. Plus particulièrement, la politique qui interdisait aux ONG de recevoir des fonds américains si elles pratiquaient ou promotionnaient l’avortement va être également abrogée.

… la fin d’un massacre ?

Cette législation est abrogée et rétablie à chaque changement d’administration entre les démocrates et républicains depuis Reagan; elle avait été rendue encore plus sévère sous l’administration Trump, puisqu’elle supprimait aussi toute aide pour lutter contre le SIDA, la tuberculose, la malaria. Cette législation est connue pour ne pas avoir empêché 6 millions de grossesses non désirées, 1,8 millions d’avortements dans des conditions dangereuses et vingt mille décès maternels.

Tolérance zéro contre les MGF

Le 6 février, c’est la journée internationale de «tolérance zéro» contre les mutilations sexuelles féminines (MGF). Le Centre d’Action Laïque plaide pour une réelle politique de prévention et de sensibilisation et rappelle quelques chiffres : on estime à 15.000, le nombre de femmes vivant en Belgique victimes de mutilations sexuelles et à 8.000, les filles à risque de l’être. Il faut donc augmenter les efforts et investir massivement dans la prévention pour mettre fin à cette pratique contraire à l’intégrité physique et psychique des filles et des femmes.

Le CAL propose une meilleure formation en matière de prévention et de prise en charge, une transmission efficace des informations et une collaboration régulière entre les intervenants et les institutions.

Peut-être pourrions-nous aussi exiger que l’Office des étrangers rétablisse le droit au séjour des parents d’enfants reconnus comme réfugiés pour cause de MGF, comme c’était le cas avant ?


Les bésicles de Jiji

Cornelius

La désignation de Mathieu Michel comme secrétaire d’État dans le gouvernement De Croo a suscité un vif émoi au MR où, selon Le Soir (2 octobre 2020), circulait le mot « népotisme ». Du latin « nepos », « neveu » ; historiquement, le « nepotismo » évoque les papes qui cardinalisaient leurs « neveux », en fait souvent leurs fils. Mais en l’espèce, on suspecte l’effet d’une « main invisible » jodoigno-européenne, de sorte qu’il s’agirait plutôt de « fratrisme ». Et Cornelius ? c’était le prénom d’un biographe latin nommé Nepos (1er siècle ACN), dont toute l’œuvre a disparu, sauf un volume qui a été plagié.

Post-script um : afin de remettre au pas (battu ? chassé ?) son ultra-président, le MR a réuni le 5 octobre ses parlementaires à Court-Saint-Étienne. Sans doute au Parc à mitrailles.

Il nous explique tout bien

La même feuille (17-18 octobre) interviewe sur deux pages J.-M. Nollet (Ecolo) : au sujet de la sortie du nucléaire, « Le calendrier sera respecté. Et si les acteurs sont au rendez-vous, on ne changera rien. Ce n’est que s’ils ne sont pas au rendez-vous que là, il faudra prévoir quelque chose ». On croyait que ce parti se refusait à la langue de bois, mais bien sûr, s’il est vert

Comme on dit en wallon

Esprit libre (magazine de l’ULB, juin-septembre 2020) présente le « master de spécialisation en management territorial » organisé sur le campus sambrien en citant le « Charleroi Bouwmeester » : « Ce master est le reflet de quelque chose qui fait sens dans une ville qui se bat au quotidien pour améliorer le quotidien de ses habitant.e.s ». Le mayeur, que l’on sait si doué en néerlandais, doit trouver que c’est beau et limpide comme de l’Yves Leterme. À Bruxelles-Capitale, le Code de l’aménagement du territoire désigne en français la fonction « maître architecte », mais « maître bâtisseur » évoquerait mieux la tradition médiévale et moins la… maçonnerie.

Héraldique erratique

En Communauté française, un décret du 12 mai 2004 permet à des particuliers de se faire attribuer des armoiries ; encore faut-il les décrire correctement. Ainsi, le Moniteur du 12 octobre publie un erratum relatif à un blason qui doit comporter « la lettre grecque PSI en lieu et place de la lettre grecque omêga ». Ou plutôt « Ψ au lieu d’Ω » si le rédigeur n’avait pas été trop fainéant pour chercher dans les « caractères spéciaux ». Et comment peut-on confondre « psitt » avec « om » ?

Ça tombe dru

  • Dans son arrêt C-331/19 du 1er octobre 2020, la Cour de justice de l’Union européenne précise que la directive sur la TVA s’applique aux aphrodisiaques s’ils contiennent « des nutriments nécessaires au maintien, au fonctionnement et au développement de l’organisme humain ». Il y a deux manières de lire trop vite ce dernier terme.

  • Au sujet des effectifs de la police, Le Soir (5 octobre) cite V. Gilles (SLFP) : « (…) la réduction du nombre de recrutements durant la législature Di Rupo à 1000 têtes ». Il ne lui en reste qu’une, celle du gouvernement wallon.

  • Justement, dans celui du 14 octobre, une page sur le désarroi du PS : en raison de la crise politique et de la pandémie, « le parti est passé après, pour ne pas dire au bleu ». Trahison !

  • Ibidem (21 octobre), l’avis d’un chercheur sur l’assassinat d’un enseignant en France : il ne s’agit plus de terrorisme de masse mais d’un « terrorisme explosé, individualisé ». Au lieu de la bombe, le couteau ; « éclaté » n’irait pas mieux.

  • Aussi (23 octobre), le spécialiste des affaires britanniques au sujet de la fracture entre les deux princes : « Si elle aime Harry, Elizabeth II a les yeux de Chimène pour ‘Wills’ appelé à régner ». Inceste grand-maternel ? How shocking !

  • De plus (30 octobre), un communiqué Belga cite Twitter : « Avec tristesse, la Force aérienne belge dit adieu au dernier pilote de chasse survivant de Spitfire de Belgique durant la Seconde Guerre mondiale ». Ce qu’on appelait une mêlée aérienne ?

  • La rubrique « C’est mon histoire » d’Elle (éd. France, 2 octobre) donne la parole à une femme qui a appris à nager, âgée de 41 ans : « J’ai eu l’impression de m’être embarquée dans une grosse galère ». Elle a beaucoup ramé.

  • Par son arrêt n° 247.449 du 23 avril 2020, le Conseil d’État a annulé un arrêté du gouvernement wallon qui déclassait, comme site protégé, deux séquoias à Sprimont. On y lit que « le moyen est fondé en sa deuxième branche ». Pas « vieille » : ils n’ont que 150 ans.

  • Au Moniteur du 23 octobre, K. Lalieux (PS), nouvelle ministre des Pensions, signe un arrêté du 19 octobre 2020 pour prolonger à nouveau le mandat de « l’administrateur général du Service fédéral des Pensions », qui est encore une femme, « jusqu’à la désignation de son remplaçant ». Pas mieux que le prédécesseur (voir J.D.J., n° 396, p. 47).