"Ici et ailleurs" du JDJ N°425

La Commission de Surveillance (CdS) …

Cinq ans après l’adoption du décret du 18 janvier 2018 portant le Code de la prévention, de l’Aide à la jeunesse et de la protection de la Jeunesse (art. 73) et quatre ans après le décret du 14 mars 2019 relatif à la prise en charge en Centre communautaire des jeunes ayant fait l’objet d’un dessaisissement (art. 121) et l’arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 3 avril 2019 instituant une Commission de surveillance des lieux de privation de liberté des jeunes, l’appel pour les candidatures des membres au sein de cette Commission a été publié au Moniteur belge du 13 juillet 2023.

Si comme le vin, ce « produit » bonifie avec le temps, le résultat devrait être exceptionnel.

… des lieux de privation …

Malheureusement, compte tenu des craintes et réticences que cette Commission (consultative et indépendante) suscite, le peu d’empressement à la créer aura transformé le nectar en piquette de piètre qualité.

La base décrétale et l’arrêté subséquent étaient déjà passablement bouchonnés puisqu’ils conditionnent l’utilisation du recours externe à une réclamation préalable auprès du fonctionnaire dirigeant de l’AGAJ, ce qui risque fort de décourager le jeune (qui ne fait pas nécessairement confiance à l’administration, autorité hiérarchique de celle qui a posé un acte critiqué) et d’allonger les procédures (une modification de cette réglementation est en cours d’élaboration).

… de liberté des jeunes

Quoiqu’il en soit, l’appel a été publié et les candidatures sont à soumettre pour le 18 août 2023. La CdS est instituée auprès du Délégué général aux droits de l’enfant (qui la préside) et ses membres sont désignés par le Parlement.

Elle est composée de 6 membres disposant d’un titre ou d’une expérience professionnelle spécifique : un juge de la jeunesse, un avocat, un psychiatre infanto-juvénile, un psychologue, un criminologue et un enseignant (sciences de l’éducation).

Notons que cette composition est plus restrictive que ce que prévoit le décret (art. 77) qui parle de «au moins» ces profils (donc pas de manière restrictive) et se fonde sur l’expérience des membres en matière de privation de liberté ou de la protection de la jeunesse.

La composition présentée par l’arrêté pourrait donc exclure d’excellents candidats qui ne sont pas repris dans cette liste fermée.

Pour une garantie européenne …

En Belgique, de nombreux enfants n’ont pas accès aux soins de santé, au logement ou à une éducation de qualité.

La garantie européenne pour l’enfant est un outil qui vise à s’assurer que «chaque enfant menacé de pauvreté ou d’exclusion sociale» ait accès à ses droits les plus fondamentaux.

Encore faut-il qu’elle soit utilisée dans le cadre d’un plan d’action reposant sur une vision d’avenir cohérente.

C’est ce que rappelle la Coalition flamande pour les droits de l’enfant (kinderrechtencoalitie.be), soutenue par la Commissaire flamande aux droits de l’enfant, qui demande d’«utiliser la garantie européenne pour l’enfant comme un outil de suivi et d’ajustement des politiques socio-économiques qui ont un impact sur les enfants et les jeunes exposés au risque de pauvreté ou d’exclusion sociale».

… utilisée conformément à sa finalité

Pour ces instances, le plan d’action national actuel n’est qu’un catalogue de mesures, qui pour la plupart préexistaient (donc, un moyen de financer ce qui se fait déjà), et non une vision d’avenir innovante.

Plus précisément, elles rappellent la nécessité de faire participer la société civile ainsi que les enfants et les jeunes eux-mêmes à l’élaboration de ces politiques, demandent un suivi et une évaluation approfondis de la mise en oeuvre du plan, l’accès à des gardes d’enfants pour tous les enfants, l’égalité des chances pour tous les enfants et les jeunes à l’école, indépendamment de leurs possibilités financières, la lutte contre le décrochage scolaire, la réduction de la pauvreté et l’accès aux services de base, l’accès aux soins de santé (mentale) pour tous les enfants et les jeunes, une plus grande attention pour les nouveaux arrivants vulnérables et des logements abordables et de qualité.

Tout un programme !

Un coordinateur pour lutter …

La Belgique vient de se doter d’un coordinateur national de la lutte contre la traite et le trafic des êtres humains en la personne de Klaus Vanhoutte, ancien directeur du centre d’accueil et d’accompagnement anversois pour les victimes de la TEH (l’ASBL Payoke).

Il s’agit d’une des recommandations de la commission spéciale de la Chambre chargée d’évaluer la législation et la politique en la matière. C’est aussi une manière de réaliser les recommandations du GRETA (Groupe d’Experts du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains). Reste à attendre des résultats concrets et la mise en oeuvre des autres recommandations.

… contre la TEH

Rappelons que «la traite des êtres humains» consiste en l’exploitation d’individus à des fins lucratives. Il s’agit d’une forme d’esclavage moderne.

L’exploitation peut être sexuelle - dans la prostitution par exemple - ou économique : dans le bâtiment, l’horeca ou le travail domestique. La traite des êtres humains se différencie du trafic des êtres humains. Celui-ci se définit par le fait de faire passer illégalement une frontière à des individus à des fins lucratives.

Tant la traite des êtres humains que le trafic de migrants sont punissables en Belgique. (voir le site web de Myria).


Les bésicles de Jiji

La frange du juge a louché

Dans l’interminable contentieux du port du voile islamique sur les lieux de travail, un jugement rendu le 5 décembre 2022 par le tribunal du travail de Bruxelles donne tort à la travailleuse qui se plaignait d’avoir été éjectée pour cette raison d’une sélection organisée par la Ville. Cependant, la décision du tribunal repose sur une curieuse motivation, scrupuleusement reproduite par Le Soir (9 décembre) : « L’interdiction faite à un agent de ne pas afficher de signe convictionnel protège le droit de l’administré à un service public neutre ». Donc, porter le hijâb (par exemple) est obligatoire et le jugement, qui se contredit, mérite l’annulation en appel (merci à Jean Louis Vander Heyden).

Encore oublié quelque chose

Le Moniteur du 2 février (3ème éd.) nous informe que dans celui du 26 janvier, l’intitulé de la loi du 13 août 2022 « modifiant la loi du 8 août 1983 organisant un Registre national des personnes physiques et la loi du 19 juillet 1991 relative aux registres de la population, aux cartes d’identité, aux cartes d’étranger et aux documents de séjour et modifiant la loi du 8 août 1983 organisant un Registre national des personnes physiques » doit se lire « (…) de séjour afin que, dans l’exercice de leurs missions légales, les membres du Comité permanent P, du Service d’enquêtes des services de police et du personnel administratif du Comité permanent P soient dispensés de l’obligation d’obtenir des autorisations pour accéder à des données à caractère personnel et les traiter ». Le prochain erratum sera livré par semi-remorque.

Enveloppé d’un casque ?

Celui du 8 février livre un arrêté du gouvernement flamand, daté du 2 décembre 2022 et qui, selon le traduisement de son intitulé, octroie « une subvention (…) pour la restauration de l’enveloppe du château de Heers et ses dépendances ». Ah ? L’original néerlandais mentionne « casco restauratie ». Ah ah ? Quoique l’origine du terme semble incertaine, on le trouve en droit immobilier, qui appelle « vente casco » celle d’un bien brut de finition, ou « étanche à la pluie et au vent ».

Le français, langue pauvre

Sur www.chambre.be, une députée N-VA a déposé une proposition de loi qui se préoccupe de la conservation des informations relatives à l’identité des fournisseurs d’ovocytes et de spermatozoïdes destinés à la procréation médicalement assistée. En néerlandais, « donorgegevens » va très bien, mais en français, on plaint le traduiseur qui n’a pu faire mieux que « données relatives aux donneurs ». Un effet de boomerang, en quelque sorte ; et en plus, ce fumet d’indicateurs de police

Ça tombe dru

  • Le Soir (3 février) publie une dépêche Belga : « Un loup a de nouveau été tué sur la N74 près de Hechtel-Eksel dans le Limbourg. C’est déjà la troisième fois que cela se produit sur cette route fort fréquentée ». Imprudent, mais dur à cuire.

  • Et une autre (18-19 février) au sujet du « plan azote » en Flandre : « Les discussions reprendront après le congé de Carnaval en gouvernement ». Enfoncé, celui de Binche !

  • Encore (21 février) à propos de ce gaz qui provient en bonne part de l’élevage, le CD&V pourrait être remplacé dans la coalition par Vooruit « pour autant que les socialistes aient envie de s’enliser dans un [tel] dossier ». Ou « s’enlisier » ?

  • Ibidem (10 février), sur J.-L. Crucke, le dégagé-rengagé : « le ‘centre’ (…) exalte la très dans l’air ‘action citoyenne’ ». Plutôt : troun de l’air (« tonnerre ! », en ancien provençal), un épithète (surtout un pareil…) placé avant le substantif doit être aussi court que possible.

  • Aussi (14 février), un billet de l’AFP intitulé : « Les passagers de [Pierre Palmade] appelés à ‘se rendre ». Sinon, ils seront abattus à vue ? Le texte explique qu’il s’agit seulement de « se rendre » dans un poste de police ou de gendarmerie pour expliquer ce qui s’est passé…

  • Et la même source (24 février) explique qu’une femelle panda devait retourner du Japon en Chine dès 2021, « mais son départ a été repoussé (…) du fait des restrictions de voyage liées à la pandémie ». Dire qu’on accusait les chauves-souris et les pangolins

  • Enfin (24 février), G.-L. Bouchez (MR) affirme que la prolongation des anciennes centrales nucléaires n’exigerait pas des travaux gigantesques : « Moi-même, j’ai des échanges [avec des experts], personnellement ». En un mot, ça lui est ego.

  • Au Moniteur du 6 février, un arrêté royal du 26 janvier 2023 « relatif au régime de travail des travailleurs occupés par des circuits automobiles se situant dans la province de Liège ». Tous tant qu’ils sont, même les pistes de Xhout-si-Plout (Manhay) et de Houte-si-Plou (Neupré).

  • Le 24 janvier 2023, l’arrêt n° 255.565 du Conseil d’État a rejeté un recours contre l’échec d’un agent néerlandophone à un examen linguistique de Selor, dans le module « écrire français administratif connaissance suffisante ». Comment a-t-il pu se faire buser ?

  • Après avoir évincé la navigatrice Clarisse Crémer en raison de son prochain congé de maternité, le groupe Banque Populaire annonce sur son site (17 février) que « les conditions ne sont plus réunies pour pouvoir aborder sereinement le Vendée Globe 2024 ». À éviter, en effet, surtout dans la marine à voile. Bref, il s’est sabordé.